Nomadis https://nomadis.ch Sat, 12 Feb 2022 18:03:03 +0000 fr-FR hourly 1 Suðurnámur https://nomadis.ch/2021/02/13/sudurnamur/ Sat, 13 Feb 2021 14:56:35 +0000 https://nomadis.ch/?p=560

22.08.2012 / Etape 3

Réveil vers 6h15. Une longue journée de marche nous attend. Un peu plus de 16 km pour atteindre notre prochaine étape, le Landmannalaugar. Randonnée à nouveau magnifique, mais éprouvante, compte tenu des dénivelés successifs. Lacs, longeant celui de la veille, surplombant ensuite le Herbjarnarfellsvatn, puis le Dómadalsvatn. Vallée de Dómaladur, située à l’ouest du champ de lave de  Dómadalshraun, que nous traversons rapidement, avant d’entamer une première ascension.

Vaste plateau, à la végétation luxuriante; puis décor minéral, couleurs incroyables d’ocre, de rouge et de jaune, lorsque nous atteignons le Suðurnàmur. Que de contrastes à nouveau, alors que nous découvrons, à son sommet, la vallée avec ses nombreux cours d’eau et l’impressionnante  coulée de lave soldifiée Laugarhraun. Premières fumerolles, les solfatares; odeurs de souffre, eau chaude affleurante… Longue traversée de Vondugil, vaste plaine qui récupère tous les cours d’eau des combes alentours; traversée de la coulée de lave avant d’atteindre le camping.

Dans la réserve, impossible de placer sa tente hors zone aménagée. Ce fût un petit choc, et pourtant nous n’étions en chemin que depuis 3 jours, que de découvrir ce « camp », ces tentes nombreuses au milieu d’un champ de boue, ce monde…. Fin août, quasi fin de saison, nous n’osons imaginer la foule en juillet….Le Landmannalaugar est en effet accessible par la « route » (F208 par le sud, ou F225 depuis l’ouest) en 4×4, de mi-juin à mi-septembre. Le cadre qui nous entoure est somptueux, mais j’ai hâte que nous puissions, à nouveau, sortir des sentiers battus.

Petit clin d’oeil… Faisant quelques recherches, je suis tombée sur une article, qui m’a bien fait sourire « Y-a-t-il des montagnes en Islande ? Histoires de refuges et de toilettes en hauts lieux« , publié dans la Revue de géographie alpine. Comparaison entre deux réserves naturelles, Fjallaback et Hornstrandir (dans laquelle nous avons également réalisé un trek de 10 jours quelques années après ce premier séjour islandais) et de l’usage des toilettes, comme indice de pratiques montagnardes, qui permettrait de répondre à l’initiale question soulevée. 

Etape précédente

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Landmannahellir https://nomadis.ch/2021/02/02/landmannahellir/ Tue, 02 Feb 2021 17:35:06 +0000 https://nomadis.ch/?p=504 20.08.2012 / Etape 2 

Réveil tôt, sous une petite pluie fine, froide. 9km28 pour cette deuxième étape qui nous conduit jusqu’à Landmannahellir,  situé dans la réserve naturelle de Fjallabak (friðland að Fjallabaki en islandais, Au delà des montagnes). Le nom de cette réserve, d’une superficie de 47 000 hectares créée en 1979, provient en effet des montagnes fortement ravinées, entaillées de profondes vallées qui la composent. Région engendrée par le volcanisme acide et l’activité géothermique du volcan Torfajökull.

Marche magnifique dans un décor superbe, chaotique, parfois apocalyptique.  Ascension douce vers de vieux cratères; explosions de roches noires, d’obsidiennes; coulées de lave anciennes; montagnes « polies », striées de trainées vertes. Impression étrange parfois d’évoluer sous l’eau, immergés dans des fonds marins, entourés d’algues mouvantes. Point de photo de cette étape, sans doute à cause de la pluie, et d’un dos douloureux, petit tour de rein au moment de soulever mon, toujours bien lourd, sac à dos.

Arrivés dans l’après-midi au refuge privé, qui appartient aux particuliers ayant des droits de pâturage communs dans la région, sous un pluie battante. Quelques heures d’attente d’une possible accalmie dans une petite cahute avant de monter la tente. Nous passerons 2 nuits dans cet endroit paisible et spongieux ;-).

21.08.2012 / Rando à la journée

Nuit de pluie et bourrasques fortes. Sol détrempé au matin, nuages bas et sombres. Bonheur tranquille cependant de partir en randonnée avec un sac si incroyablement léger, ne contenant que pique-nique du jour, appareil photo et… cape et pantalon de pluie. Marche de 12km30, d’un lac l’autre. Ne me lasse de ces paysages mouvants, changeants: rives lacustres ocres et rouille, montagnes aux étranges et fascinants reliefs, failles, roches volcaniques, champs de lave, plateaux de terre noire et grasse, désert de sable… et ces incroyables nuances de vert.

Beauté sauvage et brute des Hautes Terres isolées. Ça te prend aux tripes, te tourneboule, te coupe le souffle… et l’imagination s’emballe, parce que tout est mouvement, mystère, pulsations. Formes et couleurs, mousses et lichens, sons, cavités et cours d’eau font naître les récits, évocations, réminiscences de lectures et scènes de film. Ronde d’Elfes, le « peuple caché » ( Huldufólk en islandais) de trolls et de géants. Souffles du vent, bruissement de la mousse humide sous les pas, crissements, craquements. Aucune terre ne m’a semblé aussi vivante, vibrante.

Löðmundarvatn

Quand on voyage en Islande, il est facile d’identifier la nature d’un lieu par la terminaison de son nom. Le suffixe vatn, du vieux norrois, langue du Danemark, de la Norvège et de la Suède ainsi que des colonies scandinaves comme l’Islande pendant l’âge des Vikings, le haut Moyen Âge et le Moyen Âge central, signifie « eau ».

Sous mes pieds,
les cristaux croissent comme des plantes.
Écoute comme ils grandissent.
Je suis aveuglée par les lumières.
Écoute comme elles brillent.
Au cœur de la terre,
écoute comme ils grandissent
.

Dans une émission consacrée à Björk ( de son nom complet Björk Guðmundsdóttir) sur Arte, « Björk, la voix de l’Islande« , la journaliste parle des enregistrements que la chanteuse fait des sons de cette terre islandaise: souffles, pulsations d’un volcan, glaciers qui craquent et se meuvent,… Autant de sons, jamais retranscrits, et intégrés, de manière quasi fusionnelle, avec sa musique. Ne résiste, jóga, pour la beauté des images, des sons, et de la voix.

Eskihlidarvatn, tout en longueur. Aucun ruisseau ne l’alimente. 1k,53 km2 de superficie, pour une profondeur maximale de 27 mètres. Pique-nique rapide sur ses berges, une pluie chagrine s’étant invitée.

 

Sur le retour, du soleil… et un son étrange, en provenance du lac. Avons mis du temps, avant de l’apercevoir, et plus de temps encore, au retour, à l’identifier… Un Plongeon imbrin, Himbrimi en islandais, oiseau plutôt rare. On raconte qu’autrefois sa peau servait pour la confection des habits au Groenland. Pour une écoute de son chant, ses étranges appels, c’est par là

vers la première étape

 

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Injonctions https://nomadis.ch/2021/01/25/injonctions/ Mon, 25 Jan 2021 17:24:43 +0000 https://nomadis.ch/?p=484 Mars 2020, premier semi-confinement. A rebours, le jeu des lettres, jour après jour. Crayons, stylos et pinceaux, chiffon multicolore, petit bol d’eau. Perspectives qui s’emballent, mobilier qui se déforme, des personnages sans visage, un chat en fil rouge. Pousser le cadre.  Mains qui dansent, concentration légère et amusée. Mot d’ordre : ne suivre aucun conseil, aucunes injonctions, de celles qui auraient pu dire, allez savoir, au hasard : « Profitez de ce confinement pour stimuler votre créativité »…. Foutez moi la paix, je confine comme bon me semble, tout en, je le concède, mettant en scène le résultat….  Je me fous des paradoxes aussi ;-). Cette fois, dans l’ordre donc, plus de suspens:

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Islande https://nomadis.ch/2021/01/23/islande/ Sat, 23 Jan 2021 17:53:33 +0000 https://nomadis.ch/?p=211  

Me replongeant dans mes archives photos, je retrouve, au jour le jour, celles de notre premier voyage en Islande. Les souvenirs émergent, de manière parfois étonnement précise. Comme un récit qui se donne, se reconstruit, pas à pas, étape par étape. Comme une marche, une progression dans l’imaginaire et dans l’écriture. J’ai eu envie de revisiter ce séjour, me basant sur ces réminiscences, résonances, spontanées et nourries.

Ce séjour, nous l’avions rêvé, puis construit avec minutie. 10 jours de rando en complète autonomie, cela ne s’improvise pas…. Une carte, première prise de contact avec des lignes, courbes, noms qui chantent ou râpent, cours d’eau, glaciers, obstacles potentiels; et multitude de points d’interrogations qui fleurissent. Consultations de blog de voyageurs, dont l’un d’entre eux, qui malheureusement n’existe plus, fût particulièrement utile pour construire nos 11 étapes. Nous ne savions cependant rien de la condition physique de ces deux gars aventuriers, qui n’étaient de plus pas parti à la même saison que nous;  tout comme nous ignorions si ces tracés au crayon, croix posées, allaient rencontrer de concrètes résistance, de pierres et d’eau, sur notre future aire de jeu. Achat d’une tente résistante, de repas lyophilisés, de matos divers. « Grammage » des rations de pâtes, céréales du matin, bouillon et lait en poudre. Nos vêtements même furent pesés, histoire d’alléger au maximum notre sac (oui, oui, c’était au sous-vêtement près…), qui au final pesait, au moment du départ, quelque 23 kg.

J’aime ces périodes qui précèdent le voyage, les doigts qui courent sur une carte, l’amoncellement de matériel hétéroclyte dans un pièce, un sac qui a l’air si ridiculement petit, mais au final dans lequel tout rentre, ou presque, l’impression des billets, le réveil tôt, si tôt, au moment du départ. J’aime, ne me lasse, et me demande, en ces temps incertains de mesures sanitaires qui bouffent les rêves, à quand le prochain voyage…

19.08.2012 / Etape 1

Route 225, de terre battue. Le chauffeur de bus nous regarde, un peu incrédule, lorsque nous lui demandons de s’arrêter, au milieu de nulle part. Je revois les visages d’autres randonneurs, en route jusqu’au Landmannalaugar, fronts contre vitre, regardant T. m’aider à hisser mon sac sur mes épaules. Nuage de poussière alors que le bus repart. Il est 11 heures.

13 km parcouru pour cette première étape qui rejoint le trail de  Hellismannaleið , que nous allons suivre quelques jours. Je me souviens certes du poids du sac, de l’effort, de la marche lente; du mélange grisant d’excitation, d’incertitudes, les souffles chauds du début d’un voyage que n’estompait pas une bruine légère. Demeurent ces impressions premières, les alternances des paysages, passant de plaines de terre noire et grasse, à une explosion de couleurs brique, rouille et ocre alors que nous atteignons le cratère de Valagjá. Des collines verdoyantes, ondulantes, presque animales, ou plutôt animées, mouvantes; du vert et du jaune, de la mousse généreuse, de l’eau qui coule au milieu de roches volcaniques. Le paysage qui claque, s’ouvre, semble t’appeler.

 

Tente posée, après 6 heures de marche. Décor de rêve. Ivre de fatigue, et de joie aussi. Pluie légère. Chtttt.

Deuxième étape…

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H2 https://nomadis.ch/2019/11/23/h2/ Sat, 23 Nov 2019 17:35:29 +0000 https://nomadis.ch/?p=437 23 mars 2003

Bonsoir les amis,

Quelques lignes avant d’aller me coucher. Photo d’Hébron, encore. Grillage de partition entre H1 et H2. Soldats qui sans doute viennent de contrôler l’identité des hommes marchant en direction de cette grille, quotidiennement franchie lorsque le couvre feu n’est pas imposé, ce qui se fait de plus en plus rare… Par endroits les grillages sont remplacés par d’immenses blocs de ciments, par des fils de fer barbelés, des poubelles renversées, des tas de gravas. Parfois la frontière même est invisible et cependant connue, ressentie avec évidence. C’en est presque physique, comme si l’air se faisait plus rare, comme si le chant des oiseaux devenait inaudible. Tension palpable. H2 qui meurt en silence, qui explose cependant dans nos consciences lorsque simultanément explosent les bombes, meurent les soldats, les colons, les civils.J’essaye chaque jour de pénétrer dans cette zone, de rouler dans les étroites ruelles de cette vieille ville qui dût être si belle. Nœud au ventre, à chaque passage et tristesse lourde. Rares sont les passants. Je vois les visages aux fenêtres, les mains qui s’agitent. Parfois vole une pierre, fuse une insulte, lorsque je roule trop près des habitations des colons, que je sors du véhicule pour déplacer une entrave, un obstacle, délibérément posé, qui scinde, bloque, délimite, provoque. Maisons vieilles accolées, comme dans toute vieille ville du monde, habitées cependant par des frères ennemis. Les grilles de protection aux fenêtres, les positions militaires juchées sur les toits ne laissent aucun doute sur l’origine des habitants.

H2 mon amour, H2 mon cauchemar; H2 qui me hante et me fait parfois perdre les pédales… J’assiste en direct, impuissante, à l’agonie de cette vieille ville, agonie amorcée en 1967, agonie qui peut prendre encore des années, en râles lents ponctués de violence et de larmes, de révolte.

Il reste encore 30’000 palestiniens dans cette zone, mais chaque semaine est marquée par des départs: petites fourgonnettes parquées devant une habitation, valises et meubles chargés à la hâte, tristesse, et parfois même honte. Ils savent qu’ils ne reviendront jamais, ils savent que quelque part ils déposent les armes et cèdent, mais qui les blâmeraient ? Certains restent parce qu’ils n’ont pas le choix, d’autres parce qu’H2 est toute leur vie, leur mémoire, leur amour, leur terre, leur racines. Certains enfin, par idéologie, par combat, par haine. Mélange, peut-être, de toutes ces raisons… « Ma terre, ma ville, que tu revendiques », et raisonne de l’autre côté cet identique discours, morbide écho. Les juifs se sont fait expulsés suite aux massacre de 1929, 67 neufs d’entre eux avaient péris. Revenir est un acte de foi, porté par de dangereux fanatiques. Hébron la promise, la terre des Patriarches. Hébron berceau… mortelle Hébron.

Nos activités vont reprendre normalement demain. Plus de restriction de mouvements, plus de masques à gaz à trimbaler avec nous. Restons cependant prudent, à l’écoute.

Vous embrasse, et vous aime.

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